Résumé du livre «Le chaos climatique n’est pas une fatalité ».
L’ouvrage est préfacé par François Gemenne, professeur à HEC Paris et co- coauteur du 6e rapport du GIEC.
Ce livre est paru aux éditions l’Archipel en février 2025.
Dans sa préface François Gemenne définit la neutralité carbone, constituée par le point d’équilibre entre les quantités de gaz à effet de serre que nous envoyons dans l’atmosphère sur une période donnée et celles que la terre est capable d’absorber au cours de cette période via les puits de carbone au premier rang desquels on trouve les forêts et les océans.
François Gemenne explique que tant que nous n’aurons pas atteint la neutralité carbone les températures continueront d’augmenter, car ces températures dépendent de la concentration de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Dès lors l’équation est simple pour atteindre au plus vite la neutralité carbone et stabiliser les températures il importe donc de jouer sur 2 tableaux :
- Décarboner autant que possible et aussi rapidement que possible nos économies
- Mais également augmenter la capacité d’absorption des puits de carbone
Sur le premier tableau, nous progressons au niveau de l’OCDE mais cette progression ne compense pas la hausse des émissions dans les économies émergentes et en développement. Au total, bien que nous progressions ces progrès restent insuffisants et nous sommes donc dans une trajectoire qui emporte le monde vers un réchauffement de la température moyenne mondiale de 3,1° d’ici 2100.
Il est à noter que si les chiffres des émissions en France ont baissées de 4,54% en 2023, c’est un chiffre encourageant qui demeure cependant largement insuffisant.
De plus il est à prendre en compte qu’au sujet du second tableau la capacité d’absorption des puits de carbone forestier se réduit d’année en année. Le shaut conseil pour le climat estime que la capacité d’absorption des forêts françaises a été divisée par 2 au cours des 10 dernières années notamment parce que les forêts souffrent des impacts du changement climatique en particulier des sécheresses et des incendies
Quant à la capacité d’absorption des océans, elle reste relativement stable mais au prix d’une acidification accrue.
Or, lorsque qu’il est abordé le sujet de la neutralité carbone on se concentre souvent sur la décarbonisation et on évoque plus rarement la question de l’absorption des gaz à effet de serre présents dans l’atmosphère.
C’est tout l’objet du livre de François Rial et de Mathieu Belloir.
Tout en adhérant à la thèse du GIEC qui recommande de lutter contre une hausse du réchauffement climatique au-delà de 2 °C par rapport au niveau préindustriel tant qu’il est encore temps, les auteurs proposent une solution simple et économique qui consiste à acheter du temps afin de permettre à la transition technologique de produire massivement de l’énergie non carbonée qui se substituera progressivement aux énergies fossiles tout en permettant l’acceptabilité aux changements par la société.
Le postulat majeur des auteurs est donc qu’il faut acheter beaucoup de temps sans doute une trentaine d’années environ répondant à une génération.
Acheter du temps comment ? En absorbant massivement du carbone.
La solution proposée qui est selon les auteurs techniquement réalisable à grande échelle consiste à planter des arbres dans des zones qui n’absorbent pas déjà du carbone .
Les auteurs plaident donc pour une plantation d’arbres à grande échelle dans le monde pendant 10 ans. Il en résultera un stockage additionnel de carbone qui permettra de ralentir d’un tiers ce qui devrait être le rythme initial nécessaire et ambitieux de réduction des émissions pendant 25 ans à partir de 2050, alors les progrès technologiques et les changements de comportement permettront d’accélérer cette baisse telle est la thèse défendue dans cet ouvrage.
Après avoir rappelé l’historique de cette initialisation à la transition politique écologique de Jacques Chirac en France avec la célèbre expression « Notre maison brûle et nous regardons ailleurs » lors du sommet du 4e sommet de la terre en 2022 2002, puis les différents congrès, COP nous sommes toujours désespérément dans la recherche de transition constatent les auteurs.
Après avoir décrit les différentes modalités de captation du carbone et les territoires d’innovation en matière de captation du CO 2 et de captage et stockage du CO2 les auteurs abordent les solutions dans un chapitre qui s’intitule PLANTER POUR NE PAS SE PLANTER.
La capture du carbone atmosphérique par les arbres via la photosynthèse est en effet probablement l’une des stratégies les plus efficaces pour limiter la hausse des émissions de CO2 dans le monde. Elle est d’ailleurs évoquée dans le 6e rapport d’évaluation du GIEC publié en 2021 et 2023.
Les scientifiques reconnaissent que la plantation d’arbres par le biais de l’afforestation c’est-à-dire la création de nouvelles forêts sur les terres non forestières et de la reforestation qui consiste à restaurer les forêts sur des terres dégradées joue un rôle crucial dans l’atténuation du changement climatique en augmentant la séquestration du carbone atmosphérique pour emprisonner plusieurs centaines de gigatonnes de CO 2.
La thèse développée dans cet ouvrage s’appuie sur une étude menée par l’équipe du professeur Tom Crowther de l’université Suisse ETH Zurich publiée en juillet 2019, dans la revue « Science » et mise à jour en août 2021. Selon cette étude, 900 millions d’hectares pourraient en théorie être boisés en excluant les arbres existants et sans toucher aux zones urbaines ou agricoles existantes et nécessaires à l’avenir.
Additionnés aux forêts actuelles ces arbres auraient la capacité de séquestrer 205 gigatonnes de carbone où 750 tonnes de CO 2 soit un peu moins d’un tiers de toutes les émissions provenant des activités humaines qui restent dans l’atmosphère.
Bien entendu, il faudrait au moins 40 ans pour que les afforestations et reforestations délivrent leur plein effet, mais une forêt commence à séquestrer du CO 2 dès les premières années ce qui est autant de temps gagné pour faciliter les transitions.
Si les calculs de l’école polytechnique de Zurich ne font plus débat, le caractère opérationnel de la solution a été interrogée à juste titre par les auteurs :
disponibilité des terrains, concurrence avec les terrains agricoles et les prairies, type de végétaux plantés, coût de l’opération, agenda de la mobilisation des états, inancement ,pilotage etc
Les questions ne manquent pas mais aucune d’elles selon les auteurs ne semblent insolubles.
Une partie de l’ouvrage est consacrée à la démonstration que font les auteurs en évoquant chacune des hypothèses qui permettent de réaliser ce projet.
Notamment la capacité d’absorption des arbres qu’ils limitent à 40 ans la capacité moyenne d’absorption annuelle de 20 kilos de CO 2 par an pendant les 40 premières années, ce qui constitue une durée moyenne.
Pour les auteurs 180 milliards d’arbres additionnels plantés en 10 ans, cela représente 18 milliards d’arbres par an à partir de 2025 soit environ 4 fois plus que la quantité plantée en moyenne chaque année.
La densité de plantation est évaluée à 1000 arbres par hectare ce qui semble réaliste.
L’inertie climatique et surtout le coût estimé à 540 milliards.
Pour l’ensemble des hypothèses, les auteurs évoquent l’adaptabilité de leur modèle par le fait que si l’une ou plusieurs des hypothèses évoquées se révélaient différente de la réalité il suffirait d’augmenter le nombre ou de diminuer le nombre d’arbres à planter.
Sur la question de la possibilité de planter 180 milliards d’arbres en 10 ans.
Les auteurs révèlent en préambule que l’on plante déjà environ 15 milliards d’arbres chaque année et la proposition qu’ils font consiste globalement à doubler cet effort pendant 10 ans.
Reste alors la question du coût d’une telle opération évalué évaluée à 540 milliards de dollars par l’équipe du Pr Tom Crowther.
A cette question les auteurs démontrent que le revenu provenant de la vente des crédits carbone sur le marché volontaire permettrait selon leurs calculs exposés dans l’ouvrage de générer des revenus de l’ordre de 1500 milliards de dollars de crédits carbone soit 3 fois plus que le financement requis.
En conclusion, dans cette partie essentielle du livre, les auteurs précisent cependant qu’il faut maintenir la décarbonation de nos sociétés et que planter des arbres n’est pas une panacée mais que nous n’avons pas à disposition une meilleure solution à activer immédiatement pour gagner du temps, le temps nécessaire à l’avènement des transitions énergétiques écologiques et sociétales qui permettraient de limiter le réchauffement de la planète bien en deçà de 2 °C avant la fin du siècle ce qui donne du corps à la thèse des auteurs.
Puis les auteurs abordent 2 exemples pour tenter de convaincre les lecteurs, en premier celui de la faisabilité de l’adaptation décarbonée du transport aérien et en second celui d’un modèle d’agriculture basé sur le maraîchage bio intensif qui selon l’auteur serait un modèle écologique rentable.
J’avoue que si je n’ai pas de doute sur la sincérité des propos de l’essentiel du contenu de ce livre (les auteurs faisant don des bénéfices de la vente de leur livre à l’association A Tree for you) Il n’en est pas de même pour les deux exemples cités ci-dessus en raison du fait que Jean François Rial est le PDG de Voyageurs du monde et du fait qu’il est le créateur avec son fils de d’une ferme de maraîchage biologique dans le Perche et qu’à ce titre il y a un petit conflit d’intérêts.
En conclusion, l’idée essentielle de ce livre, c’est que la transition écologique n’est pas nécessairement incompatible avec le maintien de notre niveau de vie de développement.
Cependant il faut être réaliste et pour réussir la transition écologique tout en respectant l’objectif final il faut absorber du CO 2 et dans ce cas il est fondamental d’absorber et de capturer désormais massivement du carbone.
C’est à ce prix que nous pourrons réduire la pression utopique d’une baisse immédiate des émissions de CO 2 et nous offrir la possibilité sécurisée de la diminution de nos émissions de manière plus réaliste car plus progressive et donc plantons des arbres et évitons d’en couper pour des causes aberrantes.
Par LucBoussion de « Non à la Chaufferie de Gravenoire », l’association pour la protection de l’environnement naturel et la préservation du cadre de vie des populations à l’ouest de l’agglomération Clermontoise. Accéder au site , contactez le bureau
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